“Le magicien des temps modernes”, c’est ça le dernier film-phénomène en provenance de Corée du Sud. Un réalisateur qui avait déjà fait ses preuves avec le sympathique The Big Swindle, son premier film (le seul qui était arrivé jusque chez nous, en DVD), des scores au box-office annoncés comme gigantesques, de la magie, des combats, bref du bonheur. Pour ce qui est du box-office (rappelons que ces chiffres n’ont aucun rapport avec les qualités intrinsèques d’un film) Woochi a rameuté quelques 7 millions de spectateurs, ce qui n’en a pas fait le champion du box-office 2010 et le place tout juste dans le top 20 coréen de tous les temps. Par contre Woochi a établi un nouveau record de fréquentation pour sa première semaine, record précédemment tenu par The Last Day. Voilà pour les chiffres. Pour le reste, Woochi est un film à part dans le paysage cinématographiqe sud-coréen, entre aventure, comédie et grand spectacle. Si tout n’est pas toujours au rendez-vous, le film nous rappelle au bon souvenir d’un certain cinéma un peu fou en provenance de Hong Kong à une certaine époque, avec des défauts assez similaires et d’autres un peu ennuyeux en plus.
Quelque part Woochi renoue avec le cinéma foutraque de la période de gloire de la Film Workshop, un mélange entre kung fu comedy et fantasy. Il est donc presque par définition inaccessible à toute une large frange du public. Cela ne signifie pas que c’est un grand film, y compris pour les nostalgiques de ce cinéma, mais il est bon de le savoir. Plus largement Woochi est typiquement le film adressée à toute la famille, des plus jeunes aux moins jeunes, mais qui n’est clairement pas construit sur le modèle du “film asiatique qui plaira aux occidentaux” type Tigre et Dragon (ce qui n’enlève rien aux immenses qualités du film d’Ang Lee). Woochi ne répond à aucune règle en vigueur dans notre cinéma, il dépasse allègrement les deux heures sans vraiment se soucier d’accrocher le spectateur sur toute la longueur, multiplie les intrigues secondaires et les détails complètement inutiles, joue avec un humour complètement con et s’avère relativement radin en action. Mais pourtant ça marche, tant Woochi est rafraîchissant.
Simplement car ce joyeux bordel est bien plus organisé qu’il n’y parait. Alors certes on n’est ni chez le Tsui Hark de Zu, les guerriers de la montagne magique ni chez le Ching Siu-tung d’Histoires de fantômes chinois, le talent, la maîtrise du chaos et la poésie de ces deux là ne sont pas présent. D’ailleurs en apparence et à la lecture du synopsis, on se situerait presque du côté de l’intrigue des Visiteurs… par politesse on citera plutôt Dans la nuit des temps ou encore Terracotta Warrior, plus glorieux dans l’illustration du décalage temporel. Woochi se retrouve scindé en deux parties, une dans le passé, une dans notre époque, avec tous les quiproquos que cela peut induire. Si la partie comédie s’avère difficilement accessible pour qui n’est pas réceptif à l’humour coréen déployé ici, la fraîcheur qui émane de l’ensemble, une vraie recherche esthétique maladroite et l’illustration d’une mythologie exotique parviennent à nous emporter à plusieurs reprises. Simplement car toute la multiplication des pistes, indices et éléments d’identification crée un tel bordel qu’il devient attachant, car totalement décomplexé.
Alors il est vrai qu’à plusieurs moments on perd complètement le fil, car en plus d’être bordélique Woochi est un film très (trop) bavard et que le scénario à tiroirs pas vraiment fluide n’arrange rien à la compréhension du truc. Vrai également que tout ça est mis en scène de façon assez fade, sans signature particulière, telle une oeuvre totalement impersonnelle. Tout aussi véridique, les effets spéciaux numériques vont de l’acceptable au minable. Bref Woochi possède son lot de tares assez importantes. Sauf que tout ça est emballé avec tellement d’enthousiasme, jusque dans les prestations des acteurs en roue libre complète mais qui assurent le show, que le plaisir devient communicatif et que Woochi devient un divertissement complètement déséquilibré, parfois presque honteux, hyper commercial, mais amusant. On lui pardonne ses faiblesses de rythme, ses erreurs narratives, son côté bâtard, et on garde le spectacle familial néanmoins efficace, en grande partie grâce à la cool attitude de ses personnages.
Image : Emylia soigne sa copie HD, qui est à privilégier au sein de ce combo. Les couleurs éclatent, les contrastes sont poussés comme il faut, c’est un disque de qualité sur le plan de l’image, sans faute majeure.
Son : Du DTS HD Master Audio pour tout le monde, en VO comme en VF. Pour une fois la piste française n’est pas imbuvable et les deux mixages sont à peu près équivalents jusque dans leurs défauts. À savoir un manque général de dynamisme et des effets trop portés sur les avants. Mais rien de vraiment rédhibitoire.
Suppléments : Deux courtes featurettes pour les interviews et les effets spéciaux auxquelles s’ajoute un making-og sympathique de 25 minutes. Rien de bien passionnant ou qui irait au-delà de l’objet promo, on n’apprend pas grand chose de très intéressant sur la fabrication du film. Mais il y a tout de même quelque chose à se mettre sous la dent.
Woochi est un film ultra fun pour toute la famille et pour qui appréciera ce joyeux bordel. Le film ne passe pas par la case cinéma mais bénéficie d’un traitement de choix avec au choix le DVD ou le blu-ray. Une édition sérieuse pour un film très attachant.