Ayant sans doute bénéficié d’un certain succès d’estime en Suède, le duo de jeunes réalisateurs ayant été choisi pour mettre en scène le prochain Underworld 4 : New Dawn hérite ici d’un drôle de film pour leur passage chez l’oncle Sam. Plutôt intéressant sur le papier car nous confrontant une nouvelle fois au sujet de la schizophrénie (rien d’original mais le problème reste fascinant et cinématographiquement puissant) mais à voir le traitement qui lui est réservé au niveau distribution, il y avait de quoi nourrir quelques doutes. Produit aux USA où il n’est toujours pas sorti, alors qu’il a déjà fait un passage sur les écrans anglais par exemple, celui qui n’était connu que sous le titre de Shelter (assez logique au final) débarque directement en vidéo chez nous, et on comprend assez vite pourquoi. Car si Le Silence des ombres ne manque pas de qualités, à défaut de développer quelque chose de vraiment original, dans sa première partie, il tombe ensuite dans un grand n’importe quoi assez foutraque et un discours tout de même sacrément douteux. Si les deux lascars suivent la même voie pour Underwolds 4 on peut d’ores et déjà s’attendre à d’épiques batailles entre vampires et culs bénis, ça promet.
Au départ il y a une tentative d’aborder la schizophrénie frontalement, telle une maladie, d’y porter un regard tranché et presque inédit à Hollywood. Une bonne idée exploitée pendant vingt minutes environ. Il est toujours intéressant d’illustrer des personnages enfermés dans leurs certitudes, leur regard sur le monde en est tellement irréel. C’est ce qui se passe avec le personnage de Julianne Moore ici, sauf que ses certitudes, quelque part très liées à un drame de son passé, sont assez vite effacées, comme si ce postulat de départ n’était qu’un prétexte pour lancer l’intrigue. Le Silence des ombres devient assez vite une sorte de thriller horrifique aux effets éculés et inefficaces, qui ne surprend jamais, n’effraie jamais et ne passionne jamais. Puis sur le fil d’une intrigue dont on devine les jalons à des kilomètres viennent se greffer de nouveaux personnages qui vont faire basculer Le Silence des ombres dans le fantastique et l’ésotérique. Ça par contre on ne l’avait pas senti venir. Et ce qui ressemblait presque à un Silence des agneaux du pauvre (car à part Julianne Moore, aucun rapport avec le mal-aimé Hannibal) fait apparaître sorcières et démons sans crier gare. Seulement, la surprise aurait été bienvenue si le film ne devenait pas un affreux conte moralisateur pro-catho d’une facilité affligeante. Grossièrement le message est le suivant : “si tu ne crois pas en Dieu, ou pire si tu en dis du mal, je prendrai ton âme”. Et oui, en 2011 on peut encore voir ce genre de chose dans une production américaine, c’est rassurant non? En bref, en plus de ne jamais parvenir à trouver un niveau convenable en terme de thriller, Le Silence des ombres devient carrément méprisable dans le propos de la dernière partie. On se dit donc que cette fois, c’est une très bonne chose qu’il ne soit pas sorti en salles.
Pas grand chose de transcendant à l’image non plus. C’est plutôt soigné, tant au niveau de la mise en scène que de la photographie, mais il n’y a pas de quoi crier au génie non plus. D’autant plus que le duo de réalisateurs n’invente jamais rien et en font finalement qu’utiliser des artifices qui ne surprendront plus personne, que ce soit par leurs effets de montage ou effets sonores tellement recyclés dans le thriller qu’on les sent venir 10 minutes à l’avance. À côté d’un casting de seconds rôles solides, dont Jeffrey DeMunn, grand habitué du cinéma de Frank Darabont, et la fabuleuse Frances Conroy, inoubliable Ruth Fisher de la série Six Feet Under, on retrouve un Jonathan Rhys Meyers tellement cabotin et à côté de ses pompes qu’on se demande s’il retrouvera un jour la finesse de sa prestation dans Match Point et une Julianne Moore toujours excellente malgré un personnage écrit sans la moindre finesse alors qu’il y avait pourtant matière à creuser un peu plus ses fêlures. On n’en attendait pas grand chose malgré la présence au scénario de Michael Cooney (Identity mais aussi… Jack Frost) donc on ne parlera pas de déception mais Le Silence des ombres c’est vraiment pas terrible.
Image : Pas vraiment un disque de démo mais l’édition blu-ray reste un vrai plaisir pour les yeux. Quelques faiblesses toutefois dans la définition et quelques saletés sur la copie mais rien de rédhibitoire. Le film ne méritait sans doute pas autant d’attention.
Son : Du DTS Master Audio en VO comme en VF, deux pistes à l’efficacité redoutable qui mettent bien en valeur les effets sonores recherchés. Un léger soucis au niveau des voix parfois noyées dans l’ambiance mais là encore c’est du travail très sérieux. Comme souvent, le mixage le plus efficace est celui de la VO.
Suppléments : Pas grand chose à se mettre sous la dent, on sent bien le statut du film de commande. Quelques bandes annonces de l’éditeur, dont des futures sorties HK prometteuses, et une featurette d’une quinzaine de minutes au ton très promotionnel plus qu’informatif. Comme souvent dans ce genre de matériel, tous les intervenants ont participé à l’élaboration d’un chef d’oeuvre et c’était un vrai bonheur de tourner dedans…